1- Introduction
Johannes Heinrich Schultz fut un des premier à tenir compte de l’être humain dans sa totalité somatique et psychique.
Il exerça la neurologie, la psychologie et la psychanalyse à Berlin.
A partir de 1908, il élabore sa méthode de déconnexion concentrative, qu’il nommera « Training Autogène », de « autos » : soi-même et « gennan » : engendrer.
Il s’inspira des travaux d’Oskar Vogt sur la psychophysiologie de l’hypnose et des travaux de Freud sur la psychanalyse.
Pour mettre au pont cette méthode, il recueille des observations de sujets hypnotisés capables d’exprimer clairement ce qu’ils ont ressenti.
Il analyse les impressions sensorielles éprouvées et les modifications cénesthésiques (en rapport avec l’équilibre).
(Cénesthésie = Sensibilité organique, émanant de l’ensemble des sensations internes, qui suscite chez l’être humain le sentiment général de son existence
Par ailleurs Schultz avait remarqué que la fatigue et l’anxiété s’accompagnaient de troubles musculaires à type de contracture et que si l’on détendait entièrement le corps, les symptômes somatiques (physiques) disparaissaient.
Les deux éléments systématiquement retrouvés lors de la déconnexion hypnotique sont les sensations de pesanteur et de chaleur.
La pesanteur correspond à la décontraction musculaire et
la chaleur à la vasodilatation des vaisseaux périphériques. (Augmentation du diamètre des vaisseaux sanguins par dilatation de leurs fibres musculaires )
En 1932, à la suite de dix ans d’expériences et d’observations cliniques,
il publia : « Le training Autogène », théorie ramenant l’induction hypnotique à l’induction du sommeil par une action volontaire et personnelle, et insistant sur le rôle de la concentration intérieure et du recueillement.
Comme l’a souligné le Pr. Caycedo :
« Il a été le scientifique occidental qui a le plus travaillé pendant ce siècle sur l’harmonie et la paix intérieure de l’homme et qui a le plus contribué à la démystification des phénomènes spéciaux de la conscience humaine ». « il a dédié sa vie à établir les bases d’une nouvelle médecine holistique ».
2 – Description de la méthode
Le principe de cette méthode repose sur une série d’exercices physiologiques et relationnels, ayant pour but de mettre au repos le corps et l’esprit du sujet.
Schultz propose au cours de ses exercices, des formules suggestives sur lesquelles le sujet va se concentrer.
Par exemple, le sujet dit « ma main est lourde, de plus en plus lourde », en essayant de visualiser des images qui induisent l’idée de lourdeur, de pesanteur…
Johannes Heinrich Schultz écrit :
« La déconnexion est la détente musculaire et vasculaire réalisable par la concentration psychique ».
Des exercices méthodiques donnent la possibilité de réaliser « une plongée » intérieure et de parvenir à une utilisation féconde des forces du monde extérieur. Il peut servir à développer les facteurs de santé, comme de rendement, la maîtrise de soi, le délassement.
La déconnexion est une fin en soi.
A notre époque, la vie exige de l’homme un maximum de tension et de maîtrise de soi dans les activités quotidiennes.
Il en résulte fréquemment un état de crispation qui peut perturber jusqu’aux fonctions apparemment les plus automatiques, telles que la digestion, la respiration, la cénesthésie (ensemble des sensations internes thermiques, viscérales, respiratoires et digestives) et les activités psychiques les plus élevées.
Le training autogène suppose un état de concentration qui n’utilise pas la volonté consciente en état de tension active. Il exige plutôt un état passif à « certaines représentations extérieures spécialement étudiées ».
L’autodécontraction concentrative du Training-Autogène a donc pour but de parvenir à la détente et à la plongée intérieure, obtenant ainsi par le dedans une déconnexion de tout l’organisme qui permet d’accroître les capacités normales et de réduire ou de supprimer les déficiences anormales.
Ainsi cette méthode permet d’obtenir :
1- la détente réparatrice
2- la détente et le calme dans l’action
3- l’autorégulation des fonctions corporelles échappant au contrôle volontaire, telle la circulation sanguine
4- l’autocritique et le contrôle de soi grâce au regard intérieur qui permet la plongée
5- l’activation du positif par le système des formules intentionnelles mises en œuvre en état de décontraction.
Le Training-Autogène comprend deux cycles :
– Le cycle inférieur comportant six exercices
– le cycles supérieur analytique.
Il se pratique dans une pièce calme, peu éclairé, à température agréable. Schultz conseille trois positions :
– assise dans un fauteuil confortable
– assise en « cocher de fiacre » sur un chaise : le sujet fait le dos rond, les avant-bras reposant sur le haut des cuisses, les poignets souples et les mains pendantes.
– allongée sur le dos, en décubitus dorsal, on laisse aller les bras le long du corps, paumes vers le bas, pointes des pieds classiquement relâchées en position externe, tête retenue par un cousin ou reposant à plat, au choix.
Le sujet ferme les yeux pour obtenir automatiquement une concentration mentale.
Une première induction suggéra le calme en formulant notamment « je suis calme, parfaitement calme ». Cette induction permet d’entrer dans un état de passivité productive qui va permettre le premier exercice du cycle inférieur.
Le cycle inférieur
1/ Expérimentation de la pesanteur
Le sujet se concentre sans bouger sur la formule : « mon bras droit est tout à fait lourd », puis, il se concentre sur l’autre bras, sa jambe droite, sa jambe gauche et enfin la sensation de lourdeur se généralise au corps entier.
Schultz voit ce premier exercice comme une forme de lâcher-prise.
Lorsque la sensation est très bien maîtrisée, les tracés électro-myographiques viennent confirmer la détente musculaire.
2/Expérimentation de la chaleur
Le sujet induit la sensation de chaleur consécutive ) la vaso-dilatation des vaisseaux périphériques.
Il évoque toute image qui pour lui représente, symbolise la chaleur : le soleil, la cheminée… et induit « Ma main droite est chaude, de plus en plus chaude… » puis il généralise progressivement cette sensation : bras droit, main gauche, bras gauche, puis tout le corps.
Cet exercice est déconseillé pour les personnes ayant subi des brûlures graves ou craignant la chaleur.
3/Exercice cardiaque
Le sujet prend conscience des battements de son cœur, son emplacement. L’induction est : « Mon cœur bat calmement, régulièrement, je me mets à l’écoute de mon cœur » .
Parfois le sujet peut avoir une sensation d’angoisse pu d’oppression en début d’entraînement. Il faut alors arrêter l’exercice pour en parler. Celle-ci disparaît rapidement grâce à l’entraînement.
Cet exercice est déconseillé pour les personnes souffrant de troubles cardiaques ou ayant eu un vécu intra-utérin ou une naissance difficiles.
4/ Exercice respiratoire
Le sujet s’abandonne à sa respiration en remarquant et en suivant le rythme respiratoire automatique.
Il sent sa poitrine fonctionner, l’air pénétrer dans les poumons et répète mentalement : « Ma respiration est tout à fait calme, je suis en harmonie avec ma respiration, je ne suis que respiration ».
Cet exercice est déconseillé pour les personnes ayant des problèmes respiratoires (asthme, insuffisance respiratoire…).
5/ Exercice de chaleur abdominale
On fait appel à l’idée et à la sensation de chaleur au niveau du plexus solaire. Induction : « Mon plexus solaire est chaud, mon ventre est tout à fait chaud et cette chaleur irradie dans tout mon corps qui est agréablement chaud ». Le corps fini ainsi par baigner dans une chaleur bienfaisante.
Cet exercice a les mêmes contre-indications que celui sur la chaleur.
6/ L’exercice du front frais
« Mon front est frais, agréablement frais »
C’est un exercices difficile en début d’entraînement. Nous pouvons alors suggérer le vent frais qui vient caresser le front par exemple.
…
Le Training-Autogène se termine par une pensée ou une image positive : « Je vais avancer dans ma recherche, je suis en pleine forme… » Puis le sujet retrouve l’état de vigilance ordinaire.
L’entraînement est progressive il se fait exercice par exercice.
Le sujet s’entraîne deux à trois fois par jour pendant cinq minutes environ, en apprenant un exercice par semaine.
Cela suppose six semaines d’entraînement quotidien puis, un entraînement régulier. Les exercices s’intègre peu à peu dans la vie quotidienne.
A ce stade, le Traning-Autogène doit être effectué en cinq minutes environ, ce qui est rapide et efficace.
En sophrologie, le sujet travaille au niveau sophro-liminal. Il s’entraîne à l’aide d’un enregistrement, ce qui réduit l’entraînement à trois semaine environ.
A la fin de l’apprentissage, le sujet parvient à une relaxation physique totale induisant la détente mentale, avec une grande sensation de calme intérieur et de détachement vis-à-vis des stimuli externes.
Il peut aussi être considéré comme un relais, une mise au repos très rapide au cours des différentes activités de la journée.
Le cycle Supérieur
Celui-ci suppose une parfaite maîtrise du cycle Inférieur.
Il dure au moins deux ans et exige la direction d’un psychothérapeute spécialisé, parfaitement entraîné.
Le sujet doit arriver en état de déconnexion très rapidement pour effectuer les 10 étapes successives du cycle supérieur :
1. Orienter les globes oculaires vers le haut et regarder vers le centre du front afin d’approfondir la déconnexion.
2. Laisser apparaître dans l’imaginaire une couleur uniforme quelconque, celle-ci est liée à la personnalité du sujet, ce qui favorise une ouverture sur son monde intérieur. Ceci constitue ce que Schultz appelle le stade de la « couleur propre ».
3. Le thérapeute impose une couleur au sujet et observe ses réactions. Il recherche en particulier l’association spontanée d’un objet à cette couleur.
4. Le sujet se concentre sur un objet concret d’usage journalier et les associations d’idées sont étudiées. Selon les personnalités apparaîtront, soit une pensée abstraite (figure globale), soit des visions colorées (très forte affectivité), soit une fixation sur de petits détails précis.
5. Puis, le sujet visualisera des concepts abstraits comme le bonheur, la justice… en s’appuyant sur des expériences personnelles vécues, entrant dans le domaine du symbolisme.
6. Le sujet élabore une représentation de l’état d’âme qu’il désire réaliser, c’est la « recherche du sentiment propre » soit en ayant recours à des expériences passées, des images du monde du désir, ou à une imagerie beaucoup plus générale.
7. Puis, dans un état de concentration profonde, on propose au sujet de laisser se présenter devant lui une personne très précise, de façon concrète et plastique.
Ceci permet d’étudier les relations à autrui. On diversifie en suggérant la relation avec une personne pour laquelle ses sentiments sont neutres puis, une personne qu’il aime, puis un être pour lequel le sujet ressent de l’aversion.
8. Puis, on demande au sujet de s’observer, de se concentrer sur ses vécus intérieurs, comportant une sorte de réponse de l’inconscient. Ces questions ont pour but de faire « voir intérieurement les positions les plus importantes des différents valeurs existentielles parcourues ».
9. Le sujet fait une synthèse positive pour restructurer son comportement dans l’avenir. Il pourra ainsi envisager la réalisation de son être conformément à sa nature profonde.
D’où l’élaboration d’une devise personnelle, caractérisée par la profondeur de son ancrage. Il s’agit pour Schultz de demander au sujet d’éclairer son expérience vécue à l’aide des réponses de l’inconscient.
3 – Indications
Avant d’entraîner un sujet au Training-Autogène, il est souhaitable qu’il ait subi un examen cardio-vasculaire complet.
Il faut préciser au patient que ce qu’il ressent est normal, car on agit au niveau inconscient or, l’inconscient n’a ni loi, ni temporalité et le corps inscrit tous les événements positifs, négatifs ou neutres que traverse le sujet tout au long de son existence.
SI les réponses corporelles sont trop douloureuses, il faut arrêter la pratique de cette méthode pour en utiliser une autre plus adaptée au sujet.
En sophrologie, nous n’utiliserons que le cycle inférieur. Il permettra la déconnexion, un accès rapide au niveau sophro-liminal et une écoute corporelle que nous développerons dans toutes les techniques sophrologiques.
Si le sujet est suffisamment motivé pour se prendre en charge et vouloir agir, cette technique aider à traiter et prévenir la plupart des troubles psychosomatiques, migraines, palpitations, hyper-tension artérielle, dysménorrhées, angoisse, anxiété, insomnie…
Elle est également utilisée dans les cas de tics, bégaiement, trac, pour la préparation aux examens et les compétitions sportives.
Le training-autogène a été repris et adapté par de nombreux auteurs dont le Pr. Caycedo, fondateur de la Sophrologie.